Mobilité étudiante entre la Chine et le Liban : Apports, limites et implications pédagogiques

Mobilité étudiante entre la Chine et le Liban : Apports, limites et implications pédagogiques 651

Zeina Tohme

العدد الثاني – تشرين الثاني نوفمبر 2019

Pages 75-100

  • Abstract

    Dans le cadre de l’accord d’échange bilatéral entre les gouvernements chinois et libanais, le Centre de Langues et de Traduction de l’Université Libanaise accueille dix étudiants chinois qui poursuivent des études de langue arabe en Chine et qui viennent parfaire leurs connaissances linguistiques et culturelles au Liban. De son côté, le Centre de Langues et de Traduction a ouvert en 2015 une licence en langue vivante appliquée chinoise et les étudiants libanais ont la possibilité de poursuivre un semestre ou une année entière dans une université chinoise.
    Suite à ce programme de mobilité, les étudiants libanais et chinois ont certes amélioré leurs connaissances linguistiques mais les incompréhensions culturelles restent profondes et l’acquisition de connaissances culturelles et de compétences interculturelles et communicationnelles sont très superficielles. D’où le questionnement : (1) Quels sont les apports et les limites de la mobilité étudiante entre les jeunes libanais et chinois ? (2) Quelles sont les obstacles rencontrés par les jeunes en mobilité? (3) Quelles implications pédagogiques instaurer pour améliorer les apports de cette mobilité ?
    Afin de répondre à ses questionnements et de proposer des pistes de réflexion pour augmenter l’impact de la mobilité étudiante sino-libanaise, l’article engage une étude qualitative sous forme d’entretiens collectifs semi-guidés auprès des étudiants chinois et libanais. L’analyse des entretiens montre que les étudiants en mobilité ont acquis des connaissances superficielles liées à la culture visible et institutionnelle (histoire, géographie, folklore, économie, cuisine, art, musique, culture populaire…). Par contre, les incompréhensions liées à l’ignorance de la culture invisible comme la perception du temps, les attitudes, les valeurs, les styles de communication verbale et non verbale limitaient et freinaient les interactions qui demeuraient superficielles.
    L’analyse nous a démontré que la compétence linguistique est certes l’outil principal pour toute communication ou interaction mais elle est insuffisante pour communiquer et interagir efficacement dans une culture différente. L’apprentissage d’une culture ne se fait pas uniquement à travers l’apprentissage de la langue, par des cours sur la culture institutionnelle ou par la simple immersion culturelle. Pour apprendre une culture, il est nécessaire de connaître les dimensions cachées de cette culture et ses codes de communication verbale et non-verbale. Pour pouvoir communiquer et interagir efficacement dans une culture différente, il faudrait acquérir des compétences interculturelles, une capacité à changer de perspective culturelle et à adapter le comportement au contexte culturel.
    Par conséquent, il faudrait modifier l’approche pédagogique classique dans l’apprentissage des langues vivantes appliquées et la combiner avec d’autres approches issues des recherches sur la communication interculturelle et la psychologie interculturelle. Nous devons comprendre l’importance du suivi et du coaching des étudiants par des éducateurs entraînés aux techniques de formation interculturelle qui doivent jouer le rôle de mentors culturels. Pour ce faire, il faudrait former les professeurs à la communication interculturelle, aux techniques d’apprentissage interactive en contexte interculturel comme les jeux de rôle et de simulation ainsi qu’au coaching.

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