Quand l’espace fictionnel figure, défigure et transfigure l’espace réel : le cas de Beyrouth

Quand l’espace fictionnel figure, défigure et transfigure l’espace réel : le cas de Beyrouth 3925

Rana Baroud

العدد الثالث – نيسان أبريل 2020

Pages 92-101

  • Abstract

    Beyrouth est une ville qui a été écrite et réécrite, figurée et défigurée des centaines de fois. Or, même après la guerre et la reconstruction de la ville dans les années 90, plusieurs romanciers contemporains exogènes font rimer Beyrouth avec « destruction, chaos, mort » et d’autres termes qui instituent les isotopies de la guerre et de la décrépitude. Qu’elle soit le siège de l’action comme dans Le Quatrième Mur de Sorj Chalandon ou qu’elle figure parmi les espaces référentiels cités ou décrits comme dans Tigre en Papier d’Olivier Rolin ou Clair de Femme de Romain Gary, c’est son état désolant qui est prévalu. Il en est ainsi dans quelques récits publiés après la guerre par des écrivains francophones libanais autochtones ou allogènes qui représentent leur ville natale comme une ville en feu, une ville où ils ont connu l’amour mais aussi les bombes et les déflagrations.
    Or, tout comme le cinéma, le théâtre et les autres formes artistiques, la littérature a un impact irrévocable sur la représentation que se font les lecteurs d’un espace. Force est donc de constater que la confluence des points de vue dans les romans cités ci-dessus et dans plusieurs autres, contribue volontairement ou involontairement à diffuser une image stéréotypée, voire même négative et piteuse de notre capitale.
    Dans notre communication, nous observons à partir de l’approche géocritique, comment l’espace qu’est Beyrouth est incarné par les écrivains libanais francophones Najjar, Humaydan et Mazloum, et la façon dont ils agissent à travers leurs romans contre le déni de l’identité de Beyrouth, qu’il soit programmé ou non, contre la défiguration d’une des villes les plus belles et les plus métissées du monde. Nous tentons de démontrer que grâce à la multifocalisation, la polysensorialité, la stratigraphie et l’intertextualité, ces derniers rendent possible une compréhension dialogique de Beyrouth et parviennent par la suite à lui rendre justice aux yeux des Libanais et du monde entier.
    Keywords: Beyrouth, roman libanais francophone contemporain, géocritique, multifocalisation, polysensorialité, stratigraphie.

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